samedi 6 juillet 2019

Déménagement ou chronique d'une mort annoncée


J'ai rendu les cahiers, les dessins, les travaux.
Je n'ai pas décollé les lapins.
J'ai décroché les grands panneaux joyeux ; la toile de Monique Peytral rapportée de la maison ; le tableau de Totoro fait  par une maman d'élèves, ancienne élève elle-même; le calendrier qui nous a servi à approfondir la MHM. J'ai même décroché la pendule, à bout de course.
Je n'ai pas décollé les lapins.
J'ai déballé tous les jolis cadeaux accompagnés de leur splendides dessins ou de leurs jolies cartes; le dernier jour d'école, c'est un peu comme après le passage du Père Noël.
Je n'ai pas décollé les lapins.
J'ai bu le rosé et le saké, mangé le cake aux olives et celui au thon, et la pastèque, et les gelées, et les ganses. J'ai accroché les jolies boucles offertes par mes collègues.
Je n'ai pas décollé les lapins.
J'ai emporté les livres de ma fille, ses jeux d'enfant, la grande feuille Ikea qui était au dessus de son berceau. J'ai emporté toutes les barquettes Picard que j'ai mangées à l'école, les caisses qui ont suivi mon déménagement de la rue Gioffredo, de l'Ecole Annexe, de la rue Pertinax, de l'Ecole Dubouchage, du square Marc-Antoine Charpentier et de l'avenue Bellanda.
Je n'ai pas décollé les lapins.
J'ai regardé par la fenêtre le Pic des Courmettes; et par le balcon à colonnades, le bateau du Club Med, la colline du Château, la mer jusqu'à l'horizon et le pin parasol qui penche.
Je n'ai pas décollé les lapins.
J'ai descendu l'escalier à vitrail et caressé la jolie dame à tunique en bronze. J'ai dit au revoir à la salle de bal ou nous avons lancé la paillasse, dansé les lions du Carnaval et passé lou Rozou dark métal.
Je n'ai pas décollé les lapins.
J'ai embrassé chacun chacune de mes petits qui ont tant grandi en dix mois et certains m'ont serré longuement dans leurs bras. Au portail, un dernier bisou sur leurs cheveux trempés.
Je n'ai pas décollé les lapins.




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