dimanche 23 août 2015

Ma laïcité (2) : un combat quotidien



La laïcité est un combat, pour chacun, en chacun déjà. Ma laïcité est un combat, quotidien, avec moi-même. La part en moi qui croit, qui pense en croyante, qui espère en croyante et qui juge ainsi ; celle en moi qui travaille au sein d’un établissement public, qui pense en enseignante, qui prend des décisions pour mes élèves, qui discute avec leurs parents ; cela fait presque quarante ans que je gère cette schyzophrénie. en est-ce vraiment une ? ca l’est devenu, officiellement en tout cas.
Certains de mes amis, de mes connaissances, ne font pas ainsi. Ils ont en quelque sorte choisi leur camp, celui de la religion. Ils en portent les signes extérieurs, leurs enfants vont dans une école confessionnelle. C’est un choix respectable. En cela, ils n’imposent pas à la société leurs phobies alimentaires, leurs agendas, leurs bibliothèques. Cependant, ils l’imposent à leur famille, à leurs enfants , vivant en autharcie. C’est une position que je ne partage pas, car justement c’est le partage que j’aime dans l’école publique, ou plûtot je devrais dire que j’aimais, avant. Lorsque j’avais le CE2 et que l’on étudiait le calendrier, que chacun parlait de son nouvel an, de ses fêtes. Qui ose encore le faire aujourd’hui ?
Chaque jour, il faut remettre en question ce que j’entends, ce que je vois, les décisions que je dois prendre. Bien sûr, c’est le lot de chaque enseignant, son devoir. Mais le poids de la laïcité a pris peu à peu une place considérable. Volontairement ou involontairement. Quotidiennement, des questions qui étaient des évidences au début de ma carrière, se rajoutent aux problématiques quotidiennes.
Des exemples ?
-       Les événements attendus : peut-on fêter encore Noël ? Comment le faire ? Evacuer Jésus-Joseph-Marie-les Anges, ça je l’ai toujours fait. Faire un sapin ? Mettre une étoile au sommet ? Le Père Noël auquel tous mes Petits croient dur comme fer ?
-       Les événements inattendus : répondre au père qui pense que si l’on ne sert pas des repas hallals à la cantine on empoisonne son enfant ? Puis-je distribuer les bonbons Haribo donnés pour tous par cette famille pour l’anniversaire de leur fils ? Que dire à la mère qui s’inquiète des tableaux de nus au Musée Matisse ? Comment parler de la différence fille-garçon avec ce petit garçon aux cheveux très longs et chaussettes à fleur que tout le monde prend pour une fille ?
Certains de mes collègues choisissent le silence. Je les comprends, j’essaie de ne pas juger. On n’en parle pas. Point. On ne doit pas se substituer aux familles. Je ne peux m’y résoudre.
Ainsi, ne pas fêter Noël ? Se priver de convivialités, de petits bonheurs, de découvertes dont la maternelle est faite ? Laisser dire que les enfants sont empoisonnés à l’école ? Ne pas gérer la différenciation sexuelle ? Boycotter les peintres, les musées ?

Ne pas s’y résoudre, ce n’est pas la solution de facilité, et ce n’est sans doute pas la solution la plus sage, en tout cas certainement pas la question la plus reposante. C’est aussi épuisant, déprimant : on perd un temps précieux à réfléchir à des détails alors que le but est d’éduquer les enfants, de leur permettre d’apprendre à lire, à compter, un combat parfois démesuré contre les aprioris, les déterminismes sociaux ….

2 commentaires:

  1. bonsoir, comme cela fait du bien de lire votre billet. Je suis catho , engagée en aumônerie avec des lycéens mais aussi enseignante/directrice en ZEP avec une population à 70% musulmane., pas facile donc. Il faut tenir bon sur nos valeurs sans dire d'où on les tient...pour ma part, je fête Noêl en classe ace sapin Père Noêl et cadeaux mais je me permets aussi de demander aux parents comment c'est passer la fête de l'Aïd dans une discussion informelle devant l'école...équilibre.....

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